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ENFIN LE BLOG TRAIL D'ALBAN !

ENFIN LE BLOG TRAIL D'ALBAN !

Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos

Enfin Le Blog Trail d'Alban —
Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos
vue d'en haut ça a l'air plat ...

vue d'en haut ça a l'air plat ...

là ça cause un peu plus ...

là ça cause un peu plus ...

Non je n'ai jamais vu autant de boue en si peu de temps ! C'est bien simple les Citadelles à côté c'est Disneyland :

boue de montagne, boue de forêt tropicale, boue agricole, boue de mangrove….

Je suis expert boue Master 2 université de Saint Anne. Mes pieds vont mettre un moment à s'en remettre : boue incrustée au plus profond de la chair qui au moment de la retirer emportera les ampoules, la peau ... dessus, dessous les orteils, aux malléoles, sur les métas ... un vrai carnage.

Nous sommes 158 coureurs sur 350 a terminé en moins de 38 heures les 133 km de la Transmartinique avec ses 5 250 m de dénivelé positif. J'arriverai 97è ex-aequo avec Antoine, loin de mon objectif mais peu importe car aujourd'hui l'essentiel était de terminer !

Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos

C'est sous la pluie que je m'élance à 3h00 du matin de Grand Rivière, après une courte nuit, à peine remis d'un méchant rhume contracté 5 jours avant, donc pas à 100% mais qu'importe, la joie d'être ici à la Martinique est toujours aussi grande et vivre ces instants pour ma 2è est toujours magique. Je ferme les yeux et emmagasine toute l'énergie positive qui émane du sas de départ : 350 coureurs sur la ligne, tous n'arriverons pas à Saint Anne ...

Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos

1300m d'ascension humide m'attends avec en prime de beaux orages inquiétants. Au moment de gravir la montagne Pelée les éclairs passent non loin de nous ... et je suis pas très rassuré !

Il fait froid, il pleut, c'est la nuit, on voit rien, on glisse dans tous les sens, bref je suis dans Battlefield 4 et c'est pas sur playstation.

La descente est excessivement glissante, à 3 reprises j'évite de justesse une grosse pelle sur les dalles glissantes recouvertes par un bon ruisseau. Et j'arrive au ravito du 16è km. Déjà 16 km et 1350m D+ d’accompli …

10 minutes de repos actif et c'est reparti, 11 km dans la forêt tropicale m'attends: une grosse portion de jungle très boueuse. Les forces sont là mais la dépense d'énergie est conséquente et je sens que je risque de le payer "cash" un moment ou un autre.

Puis du km 27 au km 49 c'est grandiosement dantesque ...

car à vrai dire je n’ai jamais couru un trail dans de telles conditions… des traversés de rivières avec de l’eau, mais vraiment beaucoup d'eau, jusqu'aux cuisses, … des sentiers… pas toujours balisés et plutôt du genre ouvert à la machette … des côtes qui «tabassent» tes jambes pendant une éternité … une chaleur … oui, mais avec la pluie, c’est quand même plus sympa ! … et des descentes… non des patinoires de boues enchevêtrées de racines et de cailloux invisibles ... épuisant.

Je me gamelle 3 fois alors que je ne suis pas tombé de l'année (sauf une à l'Echappée Belle mais parce que ça le vaut bien :-)

J'en ai partout, je rigole, je sais plus comment m'essuyer et continue de courir en imaginant quelqu'un qui me verrait de l'extérieur et se dirait: " mais c'est un grand malade ... il s'est pris pour un éléphant ou quoi"

Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos
Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos
Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos
Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos

Un éléphant je sais pas mais ce qui est sur c'est que quand j'arrive à Saint Joseph je ressemble à rien et je suis obligé d'essuyer mon dossard pour montrer mon n° ... Applaudissement du public en extase, rinçage intégral, " mais il est blanc !", tension artérielle, taux de sucre (toujours pas diabétique après 20 ans de choco bn c'est un miracle), changement de chaussettes, chaussures, t-shirt, ravito complet, et hop, c'est pas encore l'heure de faire la sieste, 11h de course,

il est tout beau, tout neuf, le poil brillant, il est reparti en galopant

AAAHH les bananeraies, quel merveilleux souvenirs j'en garde de l'année dernière, la chaleur, mmm, la chaleur humide, pas de vent, des lignes droites interminables, tiens ? un virage ? des lignes droites interminables, ah je l'ai déjà dit.

vous aussi vous en avez marre des photos de bananes, écrivez-moi sur alban-arrêtes-de-mettre-des-photos-de-bananes.fr
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Je commence à alterner marche et course car mon corps passe en mode économie d'énergie (j'ai une alerte quand j'atteins 50% je soupire un grand coup du style ce serait bien si on arrivait bientôt... )

Très drôle car je viens à peine de passer la moitié. Puis arrive le moment d'anthologie de cette course, la montée de Roches Carrées. Une nouveauté 2013, j'aurais préféré que les organisateurs s'abstiennent de ce genre de "blague", une montée à 20% dans une forêt sombre et dense sur un sentier boueux crée de toute pièce pour la course où même un serpent aurait du mal à s'extirper. Des passages dantesques où il faut grimper une succession de pente cauchemardesque avec des cordes fixes glissantes sur des appuis glissants, pendant trois quart d'heure ... Dès le départ je croise un gars en sens inverse qui abandonne et me dit qu'ils sont complètement malades ... ok ... il a l'air énervé.

A mon tour je comprends vite ma douleur, et à mon tour je lutte pour grimper, mes mains glissent, mes pieds glissent, j'avance un mètre, je recule en glissant "naaaannn" puis me réagrippe sur la corde, je retire sur les bras, insulte toute la forêt, toutes les animaux, les plantes, toutes les personnes sur terre et surtout les organisateurs ...

... pendant ce temps là à Véra Cruz ...

3/4 d'heure, enfin, je sors de ce piège infernal. Je souffle, mais j'ai laissé beaucoup d'energie, beaucoup trop. Je commence à comprendre que la fin de ma transmartinique va être un calvaire ...

Km 70, il fait nuit, déjà, l'impression que la journée est passée tellement vite et a pourtant été si longue, bizarre. Une nuit complète m'attends, j'appréhende un peu. Je descends sur le François, me pose 15 minutes, essaye de manger un peu mais l'envie commence à disparaitre, je bois un peu moins aussi, pas très bon tout ça... Je repars pour les 2 dernières grosses bosses du parcours : la morne Valentin et le chemin de croix ...

Au morne Valentin, finie la boue, juste un raidar de route de fou à 20/25%. Je marche en zig zag façon haute montagne pour aller plus vite mais je suis lent. Juste avant le chemin de croix, on m'annonce à peine 75 coureurs de passés; c'est l'hécatombe.

J'essaie de me motiver à cette pensée positive de tenir ma position coute que coute, à m'accrocher, à rien lâcher, et je lance mes dernières forces dans la montée boueuse (encore) et sous quelques averses (encore). Viens la descente du chemin de croix, toujours aussi horrible et interminable que l'an passé, ce chemin mérite définitivement son nom. Je suis cuit comme un poulet boucané.

Enfin j'arrive au stade du Vauclin, 2è base vie, km 94, je me couche 30 minutes mais dors à moitié, un médecin s'inquiète, prends ma tension, ma température,

"mais tout va bien" il me dit !

je le regarde, je lui lance "non mais franchement est ce que j'ai l'air d'aller bien là, franchement ?!" (j'ai pas osé le "non mais allô quoi")

Il rigole et me dit "c'est juste une grosse fatigue".

Sans déconner, "merci docteur !"

Je me lève et repars.

Cette fois c'est un autre chemin de croix qui démarre: 40km, presque un marathon, j'ai peur !

Je me dirige aux Éoliennes; c’est bosselé, pentu, mais parfois roulant. Dans les parties favorables, je tente de courir mais pioche un peu, alors je remarche, et essaie de m’économiser, les ressources physiques et morales sont comptabilisées.

A vrai dire je réfléchis comment gérer ma fatigue. J'ai tout donné dans le chemin de croix ça a été une erreur, je peux à peine trottiner à présent, adieu les objectifs de début de course (- de 30h), mais je m'attendais pas à de telles conditions, comme tous je crois, et j'oublie pas non plus que je suis parti sans être au top, j'oublie pas que c'est aussi la dernière course de l'année, après beaucoup de km et de dénivelés parcourus (65000+ en 2013), certes la Transmartinique n'est pas l'objectif de l'année mais j'aime tellement cette course et les gens ici que je suis un peu déçu forcément de finir comme ça. Mais là ce sont les jambes qui décident, trop de courbatures, trop d'ampoules, trop mal aux pieds, au dos, partout, trop mal partout !

Avec un ami rencontré pendant la course qui vit depuis 5 ans dans les Antilles on décide de finir tranquillement, quel que soit l'heure et le classement. Lui à un genou explosé, et il est déçu aussi de finir comme ça (c'est un super coureur, 28h sur la transmartinique 2012) alors on rigole bien ensemble, et on décide de rester ensemble jusqu'à l'arrivée même si je pourrais aller un peu plus vite de mon côté. A quoi bon maintenant ! L'état d'esprit a changé.

Les plages du sud sont toujours aussi belles, arpentées au rythme des flots d’un océan redonnant des vagues et des vagues. Les sentiers côtiers et la mangrove de nuit c'est toujours aussi magique !

Sur les hauteurs des plages, le sable est trop mou, au milieu les herbes à patates me font des croches-pattes avec leurs lianes, plus au bord les tas d’algues sont plus stables mais il y a beaucoup de poches d’eau qui se cachent, alors je choisi le sable durcit par l’eau qui tente de me mouiller et qui y arrivera !!

6H le CLOU du spectacle: le lever de soleil sur l’océan.
C’est FEERIQUE. Je m’arrête contempler ces couleurs dégradées qui défilent sur l’eau.

Km 114. Il est 7h, le sable m’a entamé et me pourri les pieds, dans les chaussures tout est moisi. Je me ravitaille, bois 2 cafés et c’est repartit avec une chaleur qui s’installe.
A découvert nous passons déjà les 30°, le vent se raréfie et les nuages si complices habituellement sont absents.

Les coureurs du Défi Bleu et du Trail des Caps nous encouragent sans cesse en nous dépassant, c'est génial ! super ambiance super motivation pour nous !

C'est une fin de course difficile mais passée plus qu'agréablement en compagnie d'Antoine !

On franchit la ligne d'arrivée ensemble, Victoire !

La joie m’envahie, je repense aux grands moments de mon aventure et je savoure cet instant. J’ai trouvé quelques compagnons de route qui parlaient comme moi, respiraient comme moi avec le même but.

Une pensée aux 150 coureurs qui ne réaliseront pas ce rêve,exterminés par la boue.

Une pensée aussi aux bénévoles d’une gentillesse hors du commun.

Coup de chapeau à Gérard Zapha croisé à Anse à Prunes pour avoir tracé-balisé-sécurisé cette TMQ dans des endroits impossible!

Pour nous à présent c'est accolades, interviews, photos finisher, médaille, apéro, t-shirt finisher, j'ai peur de retirer les chaussettes et chaussures car je sais que ça va pas être joli-joli.

Effectivement, c'est pas joli-joli,

on peut même parler de massacre,

non mais comment peut-on se mettre dans un état pareil ?!

C'est qu'il faut vraiment être passionné non?

Bin oui, banane(s) !

Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos
Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos
Transmartinique 2013 : "de toute boue - faire un ciment, un marbre, un ciel, un nuage et une joie et une épave." Robert Desnos

Pendant que je finis ce récit se poursuivent les recherches de Benoit Lagrée (38 ans, Rennes), porté disparu en Martinique. Ce trailer était venu sur l’île pour participer à la Transmartinique 2013 et se trouvait en repérage avant qu’il ne donne plus de signes de vie. Depuis 10 jours maintenant, les recherches se poursuivent sur l’île par les militaires du 33ème RIMA des Forces Armées aux Antilles et les équipes de secours, dans des conditions de terrain et météo très dures. Nous avons tous porté un bracelet bleu comme symbole pour demander à ce que les recherches continuent tout au long de la course.

A présent repos, vacances, plages, rhum, acras, colombos, ti-nain morue (morue séchée avec de la banane, à prendre le matin en en-cas. C’est très tonique et vous requinque pour la journée :-)

Mwen ka souété zôt en bon lanné , é ke zôte reélisé toue vé zôte , é ke zôte ka épanui zôte adan bjob zôte é surtou koté l'anmou sa kail allé kon zote lé !!

Keep running !!

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C
Bon, arrête les bananes et met toi au Yop... parce &quot;qu'elle n'est pas yop la vie?! Félicitations!<br /> Des nouvelles de Benoit Lagrée?<br /> Bises<br /> Cilou
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B
Bravo Alban !!! C'est toujours un plaisir de te lire ! C'est bizarre car autant ton récit de l'année dernière me donnait envie autant cette année...pas du tout !!! Je pense que tu es vacciné contre la boue maintenant !!! J’espère que tu as récupéré des pieds de bébé !!! bizzzzzzzz !!!!! Thomas D.
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A
Ton récit est grandiose ....Je me la suis revécue rien n'ai exageré Tu dis 20°/° la montée de Roche Carré au niveau des cordes j'aurai dis plus de 50°/°!!! J'ai cru que j'y arriverai jamais et en plus en pleine nuit !!!! J'ai quand même fini en 39h55 ...et sans aucune ampoules!!!! Tano le matin et knock le soir 3 semaine avant la course et j'ai trouvé un produit miracle un stick style rouge à lévre fais par Compid Je m'en suis badigeonné les pieds a chaque changement de chaussette et moi qui est finie la Diagonale des fous l'année derniere les pieds en sang là RIEN même pas un bébé ampoule J'ai bouzillé mon apareil photo des Mornes rouges Si tu as d'autres photos du style que tu as mis je suis preneuse Amitié Anne
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E
Merci Anne pour tes précieux conseils, j'y veillerai l'année prochaine !<br /> Bonne Année à tous ...
H
Excellent ce récit, j'adore tes photos qui sont assez représentatives de l'état du parcours. Je fais partie du départ et non de l'arrivée, mais sans regret car je pense que je n'aurai pas survécue au Vauclun j'aurai trop insultée la boue la montagne et les fougères elles ne s'en seraient pas remises..
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